Qu'est-ce qu'un Homme Médecine ?
Tahca Ushte, Cerf Boîteux, chef spirituel de la tribu Mni
Owoju – les Semeurs près de l'eau –l'une des sept tribus occidentales de la
nation sioux nous éclaire sur ce qu'est véritablement l'Homme Médecine, le "Medecine Man" dans son ouvrage "De mémoire indienne".
« Medecine Man » est le mot utilisé par les Blancs ; il n'existe pas dans le langage indien.
J'aimerais dire qu'il y a des mots plus appropriés pour indiquer ce qu'est un «
Homme Médecine » mais je ne les trouve pas et vous n'y parviendrez pas non
plus, donc je pense qu'il faudra vous en contenter.
Sachez pourtant que ce mot ne couvre pas toutes les
significations qui viennent à l'esprit d'un Indien lorsqu'il dit Wicasa Wakan.
Nous avons différents noms pour les différents individus qui
font différentes choses tandis que vous leur donnez à tous le même nom.
Nous, par contre, nous distinguons le guérisseur : pejuta wicasa - qui est l'homme des
herbes - mais ne soigne pas uniquement avec les herbes, il doit avoir le wakan, le pouvoir de soigner. Ensuite
nous avons le yuwipi - l'homme des
peaux et des pierres qui soignent.
Nous parlons également de waayatan - l'homme de la vision qui soit dire à l'avance les
événements qui arriveront dans l'avenir car il lui a été donné le pouvoir de
voir par avance.
Ensuite il y a le wapiya-
le comploteur que vous pourriez appeler un sorcier.
Si c'est un homme bon, il accomplit un acte nommé waanazin - c'est-à-dire qu'il combat le
malaise, extrait de votre corps les choses mauvaises qui y ont été envoyées par
un esprit mauvais. En revanche, si c'est un individu malveillant, il causera
des maladies que lui seul pourra soigner, si vous le payez.
Un autre type d'Homme Médecine est l'heyoka - le bouffon sacré qui utilise le pouvoir du tonnerre pour
soigner certaines personnes.
Toutefois, plus j'y pense et plus j'en suis convaincu : le
vrai Médecine Man est le wicasa wakan -
l'homme sacré - car lui sait soigner, faire des prophéties, parler aux herbes,
commander les pierres, conduire une danse du soleil ou, même, changer le temps
; mais tout cela pour lui n'a pas beaucoup d'importance, ce ne sont que des
passages qui sont désormais derrière lui car il a conquis le wakanya wowanyanke - la grande vision.
Le wicasa wakan
veut rester seul, loin de la foule, de tous les problèmes de tous les jours.
Il aime méditer, s'appuyer contre un arbre ou un rocher et
sentir la terre bouger sous ses pieds, sentir le poids du grand ciel flamboyant
au-dessus de lui. De la sorte il peut comprendre la réalité.
Fermant les yeux, il voit beaucoup de choses clairement. Ce
qui compte c'est ce que l'on voit avec les yeux fermés !
Le wicasa wakan aime
le silence autour de lui, qui l'enveloppe comme une couverture, un silence
puissant, à la voix de tonnerre qui lui dit beaucoup de choses.
Un homme de ce genre aime rester dans des endroits où il n'y
a pas d'outres sons que le ronronnement des insectes.
Il s'assoit en regardant l'ouest et demande de l'aide.
Il parle aux plantes et celles-ci lui répondent.
Il écoute les voix des wama
kaskan - tous ceux qui se déplacent sur la terre -les animaux.
Lui ne fait qu'un avec eux. Quelque chose s'écoule en lui,
provenant de tous les
êtres vivants à tout moment et à tout moment quelque chose
émane de lui. Je ne sais pas où et quoi, mois cela existe, je le sais.
Ce type d'Homme Médecine n'est ni bon ni mauvais - il vit et
cela est suffisant. Le wicasa wakan est
simplement lui-même, il a la même liberté qu'un arbre ou un oiseau.
La liberté peut être belle ou laide, mais cela n'a pas
beaucoup d'importance. Je pense qu'être un Homme Médecine est un état mental,
une manière de regarder et de comprendre cette terre, la signification du
tout. Je suis un Homme Médecine parce qu'un rêve me l'a indiqué, parce qu'il m'a
été ordonné de le devenir, parce que les anciens m'ont aidé à le devenir.
Il n'y a rien que je puisse faire à ce propos.
Je peux vous soigner d'une maladie simplement avec de l'eau
pure et l'effet de ma vision - ce qui n'arrive pas toujours, mais assez
souvent.
On peut devenir un Homme Médecine de manières différentes,
je le suis par le biais d'une hanblechia
- la recherche de la vision.
Pour trouver sa propre vision il faut s'adresser à la
nature.
J'ai su que j'étais né pour devenir un Homme Médecine,
lorsque dans le trou où je me trouvais pour ma première hanblechia - la recherche de la vision -, j'ai entendu le son qui
était le cri d'un oiseau et j'ai compris sa voix. J'avais seize ans et je
portais encore mon nom de jeune garçon mais je savais qu'après mon épreuve, ayant
eu ma vision, on allait me donner mon nom d'homme.
Une chose me préoccupait, je voulais devenir un guérisseur, mais
on ne peut pas apprendre à être un Homme Médecine comme les Blancs qui vont à
l'école.
Un vieil homme sacré peut vous instruire sur les herbes et
sur la manière de conduire une cérémonie mais toutes ces choses, en soi, ne
sont rien. Sons la vision et le pouvoir, elles ne servent à rien.
Que se serait-il passé si je n'avais pas eu ma vision ? Si
j'avais échoué ? « Tu sauras si le pouvoir t'est donné », m'avait dit mon
oncle.
Nous, Sioux, nous croyons qu'il existe quelque chose en nous
qui nous contrôle, quelque chose comme une deuxième personne. Nous l'appelons nagi, vous pourriez l'appeler l'âme,
l'esprit, l'essence. On ne peut pas le voir ni le sentir mais cette nuit-là,
sur la colline et dans mon trou, j'ai su qu'il était en moi.
Puis j'ai senti le pouvoir m'inonder comme un fleuve en
crue. À ce moment-là, j'ai su que je deviendrais un wicasa wakan, un Homme Médecine et je me suis mis à pleurer de
joie. On devient un wicasa wakan en
apprenant le langage secret pour parler de choses sacrées, travailler avec les
pierres et les herbes, utiliser la pipe.
Un Homme Médecine doit sentir la terre, il doit pouvoir la
lire comme l'homme blanc lit un livre.
Notre croyance est profondément enracinée dans notre terre,
peu importe que vous l'ayez asphaltée, car si vous l'oubliez pendant un ou deux
ans, tout cet asphalte, nos plantes, nos plantes indiennes, pousseront sous
l'asphalte et le recouvriront.
Je ne vous ai pas tout dit sur nos usages. Vous comprenez
bien qu'il y a des choses dont il ne faut pas parler, il y a des choses qui
doivent rester secrètes. Si tout était dit, il n'y aurait plus de mystères et
les hommes ne peuvent vivre sans mystères : ils en ont grand besoin !
Tahca Ushte, De mémoire indienne;
esprit shaman
Améridiens,
esprit shaman,
Guérison,
Indiens d'Amériques